Dimensionnement du chassis

@benfraysse est ingénieur calcul et a travaillé sur plusieurs châssis de vélis. Il propose une démarche collective avec les constructeurs intéressés pour élaborer un protocole expérimental visant à effectuer des relevés terrain des accélérations que subissent les véhicules et leurs chargements. Ceci pour avoir des données plus précises pour les dimensionnements. Des essais sur banc des chassis sont aussi proposés. Il s’agit globalement de mieux dimensionner pour garantir à la fois légèreté, robustesse et fiabilité dans le temps, et ne pas constater trop tard un mauvais dimensionnement.

Ci-dessous la démarche proposée:

De tous les composants du VELI, le châssis est celui qui, sans être le plus lourd, présente à lui seul nombre de défis de conception et de construction et mérite d’être optimisé : gain de masse, réduction des coûts de fabrication… C’est le plus encombrant et donc celui qui doit être fabriqué localement. La quantité de matière qu’il représente doit aussi être optimisée si l’on veut être cohérent avec l’objectif « 10x moins ».

Les contraintes techniques sont bien connues et spécifiques à chaque projet : outre les problèmes d’intégration et d’encombrements, la fonction première du châssis étant de supporter tous les autres éléments, il est soumis à de nombreuses sollicitations qu’il est bon de connaître au préalable afin de le dimensionner au plus juste.

Or ces sollicitations si elles sont très bien documentées pour les vélos et les voitures, ne le sont pas en ce qui concerne ces véhicules intermédiaires.
La norme EN17860 fraîchement publiée (norme vélos cargo et véhicules actifs assistés de moins de 600 kg) fournit bien des valeurs d’efforts et de cyclages à appliquer sur le châssis des vélos cargo pour les tester mais l’expérience a montré que ces valeurs permettent seulement de garantir la non dangerosité des véhicules mais aucunement une durée de vie raisonnable.

Plusieurs constructeurs ont d’ailleurs pu faire homologuer leurs châssis voire même excéder les exigences de la norme et malgré tout connaître des défaillances en service après seulement quelques dizaines d’heures d’utilisation, démontrant de ce fait le manque de sévérité de la norme.

Quant aux critères appliqués par les constructeurs automobiles, il serait trop conservatif de les appliquer et ils conduiraient à une pénalisation masse trop conséquente.

Il conviendrait donc de définir une liste de cas de charge réalisables sur banc ou reproductibles par simulation qui garantiraient le dimensionnement au plus juste d’un châssis et ce pour une utilisation donnée et une durée de vie à préciser.
Ce document permettrait aussi de consulter les fournisseurs avec un cahier des charges plus précis et réellement adapté au besoin.

Une telle démarche se déroulerait en plusieurs étapes :

1- consultation des constructeurs pour évaluer / appréhender la façon dont ils/elles ont abordé la question
2- étude bibliographique : vélos, VAE, vélos cargo et triporteurs et quadricyles, voitures
3- élaboration d’un protocole expérimental visant à effectuer des relevés terrain des accélérations que subissent les véhicules et leurs chargements
4- campagne de mesures sur plusieurs véhicules de typologies différentes
5- exploitation et dépouillement des relevés terrain
6- rédaction / élaboration du document cadre

Il est estimé à 250h le volume horaire pour mener ce travail.

Les principales questions à ce stade :

  • quelle méthode avez vous employée pour dimensionner votre châssis : simulation? Tests sur bancs? tests terrains instrumentés?
  • comment avez vous défini les charges admissibles par votre véhicule?
  • quel cahier des charges fournissez vous à vos équipementiers pour sélectionner les composants de structure auxquels vous recourrez? amortisseurs, jantes, …
  • utilisez vous du matériel « vélo » sur vos véhicules? Quels retours pouvez vous nous faire sur leur adéquation à vos besoins?
  • quelle est votre politique de garantie? Durée? Nb de km? Comment l’avez vous élaborée?
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Intéressant !

Le Baker-Prax a été calculé en statique, pièce par pièce, par éléments fini sur Solidworks. Le cas de charge le plus défavorable pour le bras oscillant arrière par exemple: Le véhicule prends un virage, chargé à fond, le conducteur freine et la roue commence à perdre l’adhérence.
On a, au point de contact du pneu:

  • En vertical: Le poids + le report de charge du au virage
  • En horizontal:, dans le sens de marche: l’effort de freinage = (effort vertical) x coeff frottement pneu/sol (la roue glisse) . Ce coeff et proche de 1
  • En axial : idem horizontal (le pneu glisse).
    C’est exagéré mais comme c’est du statique. faut bien avoir un peu de marge.
    (Ps: sur l’image, l’axe est tout rouge, mais c’est normal, c’est de l’acier à 800N/mm², alors que le reste est en alu et ne doit pas dépasser 120N/mm²)
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Bonjour Jean Baptiste
Merci pour cet exemple concret. Outre les essais terrains tu as pu faire des calculs pour valider la tenue mécanique du châssis. Ton véhicule est il passé sur bancs de tests et a t il subi les tests de la norme EN17860?
Les calculs statiques permettent de faire un pré-dimensionnement du châssis et de vérifier si les ordres de grandeur sont les bons. En appliquant quelques coefficients de sécurité on peut garantir la bonne tenue mécanique de l’ensemble.
Cette démarche est intéressante en première approche mais elle ne peut permettre un dimensionnement optimisé.
En effet ces châssis sont dimensionnés par la fatigue et les surcharges dynamiques répétées. Il est donc important de considérer toute une batterie de cas de charge et plusieurs critères (plastification et durée de vie fatigue).
Comment faire en sorte de garantir une durée de vie de plusieurs années (et donc plusieurs dizaines de milliers de km d’utilisation) à des familles ou des professionnels?
On « vend » le fait que ces véhicules sont destinés à remplacer une seconde voiture.
Si l’on prend un usage familial : les tournées quotidiennes peuvent aisément atteindre 30 km en milieu péri-urbain voire un peu plus en milieu rural. Si on fait ça 220 jours par an on part sur une base de 6000-7000 km annuels. Si on veut garantir le véhicule 10 ans il faut qu’il soit en mesure de supporter 70 000 km. Les normes EN15194 ou 17860 sont plutôt pensées pour 10 000 km et ne sont donc pas adaptées.
Dans le cas d’un usage professionnel les distances annuelles parcourues sont plutôt de l’ordre de 10 000 km et les clients veulent être sereins pendant 5 ans donc on part sur 50 000km d’usage intensif (c’est le cahier des charges qui m’a été fourni pour un triporteur par un gros client qui fait de la livraison).

La masse étant l’ennemie des VELIs on ne peut pas se permettre de sur-dimensionner les châssis en étant conservatif et en utilisant des coeff de sécurité confortables. il faut donc dimensionner au plus juste et ça passe par une bonne connaissance des sollicitations.
Les VELIs de logistique qui évoluent en zones pavées subissent par exemple des accélérations verticales répétées qui peuvent atteindre 3g et ce un grand nombre de fois.

L’objet de l’étude que je propose est donc de document tout ceci et de créer un guide de dimensionnement.
Identifier les sollicitations et les quantifier permettra aussi de rédiger au mieux les cahiers des charges des composants des VELIs.
Bref, il me semble que c’est une info essentielle a obtenir et dont les usages sont multiples.

  • quelle méthode avez vous employée pour dimensionner votre châssis : simulation? Tests sur bancs? tests terrains instrumentés? → l’œil de l’ingénieur expérimenté, le calcul pour certains éléments clefs, les tests en conditions réelles, saut de trottoir et passage en force dans grosses ornières (choc réaliste = 4G d’accélération !!!), simulation FEA bien paramétrée pour les sous-ensembles critiques, test par pilote « lourd » et finalement coefficient de sécurité de 2,5 !

  • comment avez vous défini les charges admissibles par votre véhicule? → par le besoin. Ce n’est pas le véhicule qui défini la charge mais le contraire.

  • quel cahier des charges fournissez vous à vos équipementiers pour sélectionner les composants de structure auxquels vous recourrez? amortisseurs, jantes, … → aucun, le standard vélo et les techniques de fabrication utilisées suffisent à garantir la fonctionnalité

  • utilisez vous du matériel « vélo » sur vos véhicules? Quels retours pouvez vous nous faire sur leur adéquation à vos besoins? → oui adéquation quasi-parfaite, mais le véhicule ressemble beaucoup à un VAE

  • quelle est votre politique de garantie? Durée? Nb de km? Comment l’avez vous élaborée? → aucune garantie car le véhicule n’est pas vendu. Les expériences utilisateur.ices font foi et convainquent les futur.es auto-constructeur.ices. La garantie implicite est : durée de vie infinie, dizaines de milliers de km possibles, améliorable et mise à jour possible vers nouvelles versions à l’infini

Sur l’image de @prax si on considère une ornière qui cause une une accélération de 4G les 150 N/mm2 se transforment en 600 N/mm2 et la marge de sécurité à 800 N/mm2 n’est plus que de 0,3… Heureusement les suspensions réduisent cette accélération, reste à savoir de combien :slightly_smiling_face:.